De la mort à la vie

De la mort à la vie

Cette semaine, alors que j’animais une session de mentorat, la personne débuta en me disant : « je suis intolérante, en colère, agressive, je n’ai pas de filtre et je me sens bizarre. » Après avoir écouté son histoire, nous avons conclu qu’elle avait vécu une expérience de travail traumatisante. Son superviseur, étant lui-même une personne blessée qui a des difficultés à maintenir des relations authentiques, a été, envers elle, blessant et intimidant sur une longue période. Après une trentaine de minutes de discussion, nous avons reconnu qu’elle vivait en fin de compte, des symptômes semblables à ceux du deuil. Voici donc, les émotions et comportements que nous devons souvent gérer lors d’un départ professionnel dû à un environnement abusif ou malsain, d’une fin de contrat ou d’un licenciement. Le processus est très semblable à celui d’une personne qui perd un être cher. 

Pour ceux de vous qui êtes pasteurs ou superviseurs, je vous suggère d’être à l’écoute et d’observer, à la lumière des étapes du deuil, le comportement des personnes dans votre église ou organisation qui expérimentent un deuil suite à un décès ou une expérience douloureuse ou traumatisante.

Au cours de ma carrière militaire, j’ai étudié les travaux du docteur Elizabeth Kübler-Ross, psychologue, ainsi que d’autres spécialistes du comportement qui ont développé les différentes étapes ou phases du deuil, soient : Le choc, le déni, la colère et le marchandage, la tristesse/dépression, la résignation, l’acceptation et la reconstruction. Voici ce que j’ai pu observer à travers mon expérience de vie. Les étapes du deuil se vivent après le décès d’un proche, d’une rupture de couple, de même que dans le domaine professionnel, lors d’une fin d’un contrat ou d’un licenciement. Toutes ces pertes sont beaucoup plus que de simples changements; elles sont de véritables « transitions » et toutes transitions amènent à expérimenter certaines, sinon toutes les étapes du deuil. Elles sont :


Le choc : Phase qui peut être relativement courte, débutant avec l’annonce d’une rupture ou d’un décès et qui souvent laisse la personne sans émotion apparente. Des paroles comme : « Il est mort! », « C’est fini, je te quitte », ou bien « Vous êtes viré/congédié », peuvent créer un état de choc ou le cerveau décide de se protéger en « bloquant » toute réaction émotive face à la nouvelle.  Une personne peut avoir l’impression d’être « engourdie» émotionnellement et incapable de pleurer ou d’exprimer ses sentiments. C’est une phase temporaire qui permet à la personne d’absorber le choc de la nouvelle.


Le déni : C’est le refus de voir cette « nouvelle réalité » et il lance la personne dans une discussion qui est premièrement intérieure, et qui est souvent suivie par un besoin de partager avec d’autres. Cette période peut être brève, mais tout accompagnateur sait que certaines personnes s’enferment dans cet état et cela les empêche de vivre pleinement leur deuil. Le déni s’exprime avec des mots tels que : « Ce n’est pas vrai, c’est impossible qu’elle / il soit mort(e)! Dites-moi que je rêve! » ou « C’est impossible que je sois congédié, j’ai toujours bien fait mon travail.  Je vis un cauchemar! »  

 
La colère et le marchandage : Cette étape en est une de « confrontation » entre les faits et ma perception ou mon interprétation de ces derniers. Soudainement, une éruption d’attitudes et de sentiments tels que la colère, la révolte, la perception d’une injustice, une intolérance et parfois même un sentiment de vengeance prennent place. Il n’est pas rare qu’une personne endeuillée cherche « un coupable » à blâmer. Pourtant, en bout de piste, cela ne diminue en rien la douleur de la perte et ne change pas pour autant les circonstances. Étant confrontée à l’impossibilité d’un retour en arrière, la personne, en l’occurrence, doit donc commencer à faire son deuil et peut, expérimenter toute une gamme d’émotions allant des reproches, des remords, du ressentiment, du dégoût, allant jusqu’à juger ceux qu’elle accuse d’avoir été incompréhensifs. Le discours de cette étape peut ressembler à ceci: « C’est de leur faute, ils ne comprennent rien. J’ai tout donné et ils n’ont jamais rien fait pour moi ». Il est à noter que l’intensité peut varier selon la maturité affective de la personne.


La tristesse : Cette étape peut être plus ou moins longue et peut inclure également des remises en question, de la détresse psychologique et de la désorganisation. Ayant vécu une grande gamme d’émotions, les endeuillés ont parfois l’impression qu’ils ne sortiront jamais de ce labyrinthe d’émotions douloureuses.


La résignation : La phase où l’endeuillé abandonne la lutte contre l’inévitable et reconnait qu’il est impossible de revenir en arrière. Il est possible que la personne soit encore dans un état de grande vulnérabilité émotive, incapable d’envisager l’avenir. Cette résignation s’exprime par des commentaires comme : « C’est la vie, Dieu est au contrôle. Je n’ai aucune idée de ce que je vais devenir. Je n’ai pas le choix, la vie doit continuer! ».


L’acceptation : Au cours de cette phase, la personne accepte la perte de l’être cher ou de son travail. Elle peut se remémorer, à la fois, de bons souvenirs mais également reconnaître, avec lucidité, les moins bons. Elle commence à entrevoir un avenir sans cette personne ou ce travail, à envisager la possibilité de refaire ou de réinventer sa vie.


La reconstruction : À ce stage, la personne se reconstruit progressivement une nouvelle réalité. En se détachant lentement de l’être aimé, elle peut alors commencer à jouir d’une nouvelle perspective de vie. Petit à petit, la vie reprend son cours, et ce qu’elle voyait comme une impossibilité au niveau de l’étape deux et trois, devient une réalité. L’endeuillé prend conscience qu’il est en train de se réorganiser et même de se réinventer une nouvelle vie. Progressivement, le sentiment de vulnérabilité fait place à une nouvelle énergie et, pour le croyant, une plus grande dépendance de Dieu se développe.

 

Bref, le soleil finit toujours par poindre après la tempête, le printemps fait toujours suite à l’hiver de même que la vie reprend le dessus après la mort ou toute autre perte.

 

Question de mentorat : Quel est le geste le plus important à poser pour accompagner quelqu’un dans son deuil?

 

 

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