La fleur au bout du fusil

La fleur au bout du fusil

Dans une petite ville du centre de la France, sous une chaleur écrasante, toutes les élèves de l’école de filles étaient réunies dans la cour, au garde-à-vous devant Monsieur le Maire qui transpirait à grosses gouttes. Madame la Directrice, les joues écarlates, étouffait dans son corset, mais gardait dignement la tête haute devant ses institutrices. Blanche venait d’avoir 11 ans. Elle attendait son prix, fière d’avoir décroché la première place au certificat d’études primaires. Quel honneur ! Elle n’était pas bien riche et ses études s’arrêteraient certainement là, mais quelle fierté !

Soudain, un tonnerre l’arracha à ses pensées : les cloches de l’église battaient à toutes volées, Monsieur le Maire se tordait le cou pour comprendre ce qui se passait. Un murmure étonné et inquiet passait dans l’assistance. C’était le 3 Août 1914. L’Allemagne venait de déclarer la guerre à la France.
La nouvelle se répandit vite et la cérémonie de remise des prix fut écourtée. Blanche récupéra son prix de justesse, sans les honneurs, sans les compliments, et toute l’assistance se volatilisa en quelques minutes. Dans les jours qui suivirent, ce fut la mobilisation générale. Tous les jeunes hommes devaient partir. Les mères pleuraient, mais quel enthousiasme chez ces garçons ! Enfin, ils allaient pouvoir en découdre avec les troupes du Kaiser, se venger de la déconfiture de 1871, et récupérer l’Alsace et la Lorraine ! En quelques jours ils furent prêts. Ils avaient 18 ans, le cœur enflé de courage, la fleur au bout du fusil et la bouche pleine de cris vengeurs. Ils partirent pour une guerre « fraîche et joyeuse »... et c’est dans une grande détresse qu’ils revinrent. Ceux qui furent épargnés, arrivèrent brisés, parfois défigurés, estropiés. La fleur n’était plus au bout du fusil, et le cœur était pour de longues années, plongé dans un profond abattement. Pauvres garçons, où étaient leur joie, leurs nobles desseins ?..

 On se lance parfois dans des combats avec la fougue du jeune loup, prêt à en découdre quel qu’en soit le prix. On a de grands projets, certains de notre appel et de notre force. Que pourrait-il nous arriver ? Partir au combat avec la fleur au bout du fusil, c’est très bien, mais encore faut-il la conserver. Garder la joie et la fougue dans son service chrétien, c’est peut-être une des choses les plus difficiles à faire, mais c’est essentiel. Sur la route nous attendent des expériences magnifiques, de belles réalisations, des exaucements de prières incroyables, mais aussi les coups, les déceptions, les trahisons parfois. Quand on regarde l’histoire de l’Apôtre Paul, on le voit réaliser une œuvre époustouflante, mais on le voit aussi dans les tourments, les coups et les souffrances. Il en a vu de toutes les couleurs, cet homme ! Pourtant, au contraire de beaucoup d'autres, il n’a pas perdu sa joie de servir : il regardait au but, et ses yeux étaient fixés avec détermination sur la couronne qui l’attendait et sa rétribution. Il se fortifiait chaque jour avec sérieux auprès de son Maître, car il savait que des combats difficiles l’attendaient.

Alors si les coups pleuvent en ce moment pour vous, ne soyez pas étonnés, c’est même plutôt bon signe. Relevez la tête et faites face, car le meilleur est à venir, ce n’est pas le moment de baisser les bras. Gardez votre fleur au bout du fusil ! Je vous dirais comme Néhémie, Esdras et les Lévites disaient au peuple dans l’abattement : « Ne soyez pas dans la désolation et les larmes, ne vous affligez pas car la joie de l’Eternel sera votre force » Néhémie 8 :9-10.

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(Romains 1.16)

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