Isolé géographiquement, malade ou handicapé, confiné par obligation ou sans église fixe, un chrétien peut-il prendre la sainte cène chez lui ?

La sainte cène n’est pas mentionnée sous ce titre dans la Bible. Les évangiles synoptiques décrivent le dernier repas de la Pâque de Jésus avec ses disciples. L’apôtre Paul l’appellera ensuite “le repas du Seigneur” ou la fraction du pain.

La dernière Pâque de Jésus

L’heure est grave, la mise en scène orchestrée par Jésus est poignante, presque tragique. L’ambiance est très tendue. Ce qui aurait dû être une soirée festive entre amis autour d’un bon repas, se transforme en une veillée dramatique.

L’apôtre Jean ne décrit pas le repas. Il met toute l’emphase sur le lavement des pieds par lequel il a commencé. Jésus, leur maître et Seigneur, vêtu comme le dernier des serviteurs, se met à leur laver les pieds un par un, en les enseignant sur l’humilité.

Annonce de son arrestation et de sa mort

Jésus avait déjà annoncé plusieurs fois sa mort à ses disciples. Il leur redit juste au début du repas :

« Vous savez que la Pâque a lieu dans deux jours et que le Fils de l'homme sera arrêté pour être crucifié. » Matthieu 26.2

Il leur dit : « J'ai vivement désiré manger cette Pâque avec vous avant de souffrir car, je vous le dis, je ne la mangerai plus jusqu'à ce qu'elle soit accomplie dans le royaume de Dieu. » Luc 22.15-16

Annonce de la trahison d’un des disciples présents

Pendant qu'ils étaient à table et qu'ils mangeaient, Jésus dit : « Je vous le dis en vérité, l'un de vous, qui mange avec moi, me trahira. » Marc 14.18-21

Imaginez le froid que ces paroles ont dû jeter ...

Injonctions de Jésus pendant ce repas

Evangile de Luc : « Faites ceci en souvenir de moi. » Luc parle du partage du pain et du vin.

Evangile de Jean : Si donc je vous ai lavé les pieds, moi, le Seigneur et le Maître, vous devez aussi vous laver les pieds les uns aux autres, car je vous ai donné un exemple afin que vous fassiez comme je vous ai fait. Jean 13.14-15

Matthieu et Marc ne mentionnent pas ces injonctions de Jésus.

Dimension communautaire de la sainte cène

Les prières juives sont communautaires. La première cène était communautaire. Paul insiste sur cette dimension dans une de ses épîtres :

La « coupe de reconnaissance » sur laquelle nous invoquons la bénédiction du Seigneur ne signifie-t-elle pas que nous sommes au bénéfice du sang du Christ versé pour nous ? N’est-elle pas une expression de notre communion avec lui ? Et le pain que nous rompons, ne représente-t-il pas notre communion au corps du Christ ?
Du moment qu’il n’y a qu’un seul pain, nous tous, malgré notre grand nombre, nous ne formons qu’un seul corps, puisque nous partageons ce pain unique entre tous et que chacun en a sa part. 1 Corinthiens 10.16-17 (Parole Vivante)

Une disparité de pratiques aujourd'hui

Aucune dénomination ne répète à l’identique le déroulement de ce dernier repas pascal de Jésus. 

• le “seder” (repas de Pâque) avec ses rituels très précis, est typiquement juif. Il n’a pas été perpétué par les chrétiens

• il s’agit d’un repas du soir (deipnon)

• la sainte cène, l’eucharistie … ne commencent pas par un lavement des pieds

• elles ne se déroulent pas pendant un repas

• elles sont aussi ouvertes aux femmes

• sauf dans le cas des églises de maison, elles se pratiquent le plus souvent dans des bâtiments dédiés

• les éléments peuvent varier : pain levé ou azyme, vin rouge ou blanc,  jus de raisin sont les plus courants

• la coupe commune peut être remplacée par des gobelets individuels

Cas particuliers

• certains chrétiens sont très isolés géographiquement, loin de toute église

• certains sont malades ou handicapés, et ne peuvent pas sortir de chez eux

• certains, comme en ce printemps 2020, sont confinés chez eux pour raison sanitaire

• certains risquent leur vie et celle de leurs proches s’ils rejoignent une assemblée

• certains sont en rupture avec le fonctionnement ecclésial, les “sans église fixe”

Culte en ligne ou en visioconférence

Il n'existe évidemment pas de verset qui réponde directement à la question posée dans le titre. En effet, le seul vecteur de communication de l'époque était le pigeon voyageur !

Aujourd'hui les médias nous permettent de rester en relation, en communication et même en communion avec beaucoup de gens depuis nos maisons.

Et la technologie actuelle permet la diffusion au plus grand nombre sans bouger de chez soi.

Sans entrer dans l’étude détaillée des différents cas de figure, on peut supposer que Jésus ne condamnerait pas ceux qui, à cause des limites citées plus haut, s’associent virtuellement et de tout coeur à une célébration retransmise sur un écran, qu’elle soit en live ou en différé.

On pourrait aussi penser que Jésus ne condamnerait pas le partage fraternel, même s’il est virtuel, de la sainte cène.

Conclusion

Le focus mis par l'apôtre Jean sur le lavement des pieds nous invite à voir encore plus loin que le partage du pain et du vin. Plus encore que dans la pratique d'un mémorial, Jésus nous demande de vivre dans une attitude de serviteur, à son image et à sa ressemblance. Alors nous serons ses amis.

La sainte cène est une nourriture, c'est pourquoi nous pouvons vraiment appliquer ce verset :

Tu as une ferme conviction personnelle ? C’est bien. Garde-la pour toi devant Dieu, mais ne la brandis pas devant les autres, sois content de pouvoir prendre tes décisions sans être troublé par des scrupules, et sans avoir besoin de tranquilliser sa conscience. Oui, heureux celui qui ne se juge pas condamnable dans le parti qu’il adopte !
Romains 14.22  (Parole Vivante)

Et vous, comment pratiquez-vous ? Vous pouvez témoigner en commentaire.