La peur du «qu'en dira-t-on?»

La peur du «qu'en dira-t-on?»
Cher Pasteur,

Dans un précédent article (Orgueil et humilité), j'ai évoqué les raisons pour lesquelles nous naissons tous avec un complexe d'infériorité latent. Il n'est donc pas étrange que la plupart de nos contemporains s'inquiètent, avec plus ou moins d'intensité, de ce que les autres pensent d'eux.

Je ne voudrais pas prétendre qu'il ne faille jamais s'intéresser à l'opinion des autres, même celle nous concernant. Cependant, lorsque cela se transforme en peur du qu'en dira-t-on, il y a péril en la demeure. Cette crainte, comme toutes les autres craintes d'ailleurs, est non seulement paralysante, mais elle nous incite à prendre des décisions souvent injustes et inadéquates.

Injustes, parce que l'opinion des autres n'est pas nécessairement la meilleure. Inadéquates, parce que cette opinion d'autrui risque de nous obnubiler, et de nous empêcher d'avoir un raisonnement sain.

La Bible nous fournit des exemples de personnages qui se sont laissés asservir par la peur du qu'en dira-t-on, et d'autres qui, à l'opposé, ont refusé cet esclavage. Un exemple frappant de la première catégorie est le roi Saül. Sa crainte d'être mal jugé par son peuple le conduira à désobéir à Dieu :

"Alors Saül dit à Samuel : J'ai péché, car j'ai transgressé l'ordre de l'Éternel, et je n'ai pas obéi à tes paroles ; je craignais le peuple, et j'ai écouté sa voix. Maintenant, je te prie, pardonne mon péché, reviens avec moi, et je me prosternerai devant l'Éternel. […] Saül dit encore : J'ai péché ! Maintenant, je te prie, honore-moi en présence des anciens de mon peuple et en présence d'Israël ; reviens avec moi, et je me prosternerai devant l'Éternel, ton Dieu." (1Sam 15.24-30)

Saül finit par reconnaître son péché et sa désobéissance, mais il refusa de perdre la face par peur du qu'en dira-t-on. C'est pourquoi son faux repentir ne sera pas agréé de Dieu, qui le rejettera.

Tout autre est le comportement d'Abram lors de la querelle de ses bergers avec ceux de Lot. Bien que possédant l'autorité en tant qu'oncle, il décide de laisser le choix à son neveu :

"Il y eut querelle entre les bergers des troupeaux d'Abram et les bergers des troupeaux de Lot. […] Abram dit à Lot : Qu'il n'y ait point, je te prie, de dispute entre moi et toi, ni entre mes bergers et tes bergers ; car nous sommes frères. Tout le pays n'est-il pas devant toi ? Sépare-toi donc de moi : si tu vas à gauche, j'irai à droite ; si tu vas à droite, j'irai à gauche." (Gen 13.7-9)

Ce faisant, il risquait de perdre la considération des serviteurs de Lot et des siens propres, qui ne manqueraient pas de le taxer de lâcheté. Toutefois pour Abram, ce qui comptait, ce n'était pas l'opinion des hommes, mais celle de Dieu.

Ce profond désir de plaire à Dieu plutôt qu'aux hommes animait également l'apôtre Paul :

" Car notre prédication ne repose ni sur l'erreur, ni sur des motifs impurs, ni sur la fraude ; mais, selon que Dieu nous a jugés dignes de nous confier l'Évangile, ainsi nous parlons, non comme pour plaire à des hommes, mais pour plaire à Dieu, qui sonde nos cœurs." (1Thes 2.3-4)

Voilà une noble attitude qui devrait faire réfléchir tous les prédicateurs de l'Évangile. Nous sommes appelés à transmettre le message dans toute sa pureté et sans compromission de quelque sorte. Que Dieu nous préserve de nous laisser séduire par un Évangile à l'eau de rose, fait pour satisfaire ceux qui ont "la démangeaison d'entendre des choses agréables" (2Tim 4.3), et dont le souci majeur est d'être caressés dans le sens du poil ; "un autre Évangile", dirait le même Paul, qui n'est pas tendre à l'égard de ceux qui le professent (Gal 1.8-9).

J'ai bien connu un serviteur de Dieu, d'une très grande valeur spirituelle et magnifiquement consacré, qui, par peur du qu'en dira-t-on, ne serait, de son propre aveu, jamais allé faire des courses dans un supermarché, de crainte d'être critiqué par les membres de son église. Il faut dire à sa décharge que les critiques allaient bon train dans cette ville. Je fus plus tard moi-même accusé de passer mes journées dans un supermarché pour y écouter la musique ! J'avoue avoir été vexé surtout de m'être vu attribuer un goût musical aussi déplorable !

Quoi qu'il en soit, la peur du qu'en dira-t-on réduit un conducteur spirituel au rôle subalterne de wagon, et non de la locomotive qu'il devrait être (pardon pour cette métaphore : mon père était cheminot !). Le seul remède que je connaisse contre ce fléau, c'est l'honnêteté, envers et contre tout, avec la protection divine qui s'y rattache :

"La crainte des hommes tend un piège, mais celui qui se confie en l'Éternel est protégé." (Pr 29.25)

Ceux donc qui veulent être de véritables serviteurs de Christ feront bien de dire, et de vivre avec Paul :

"Et maintenant, est-ce la faveur des hommes que je désire, ou celle de Dieu ? Est-ce que je cherche à plaire aux hommes ? Si je plaisais encore aux hommes, je ne serais pas serviteur de Christ." (Gal 1.10)

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