Un peu de grâce, s’il vous plaît

Un peu de grâce, s’il vous plaît

« Si tu gardais le souvenir des fautes, Eternel, Seigneur, qui pourrait subsister ? Mais le pardon se trouve auprès de toi… Psaume 130.3-4

Quand j’ai entendu la raison qu’une nouvelle famille a donnée pour quitter notre église, j’aurais probablement dû rire.

« Ils partent parce que leur fils a peur de Tera ? Notre Tera ?

« L’unique. » Dave s’est débarrassé de son manteau. « Je leur ai demandé s’ils étaient prêts à rester et à résoudre le problème, mais ils ont dit non. »

« Mais …Brandon est plus grand….et il a six mois de plus que Tera ! Qu’est-ce qu’elle peut faire pour l’effrayer ? »

« Tout ce qu’ils ont dit est qu’il ne voulait plus venir au groupe d’enfants le dimanche de peur de voir Tera dans la salle. Ils n’ont pas développé et ils ne voulaient plus en parler. »

Je ne pouvais pas le croire. Je savais que parmi les enfants de cinq ans, Tera avait une réputation d’être un peu autoritaire, mais elle n’était pas méchante. Etait-ce une nouvelle étape horrible ?

J’ai passé une grosse partie de la semaine inquiète—et en rage un peu pour être honnête. J’aurais souhaité que la famille nous ait donné un avertissement. Peut être que nous aurions pu résoudre le problème ensemble.

Et j’aurais souhaité qu’ils montrent un peu de grâce envers Tera. Dans notre communion fraternelle, nous parlions souvent de la grâce. Dave abordait le thème à travers ses messages. Les hommes s’exhortent les uns les autres à montrer la grâce dans leurs foyers. Pendant mes propres enseignements dans mon ministère pour les femmes, j’encourage les femmes d’être les vaisseaux de grâce envers leurs maris et leurs enfants. Comment ce message a-t-il échoué?

Jeudi de cette semaine-là, Zac m’a rappelé que tout le monde se rendait chez Paula pour une étude biblique dans l’après midi. Il n’était pas intéressé par l’étude mais par le groupe d’enfants qu’il savait être là. La maison de Paula grouillait d’enfants les jeudis après-midi.

« Pouvons-nous aller aujourd’hui, Maman ? » plaida-t-il.

Nous n’y allions pas d’habitude. Nous enseignions nos enfants à la maison en ce temps-là, et nous n’étions pas aussi discipliné que je l’aurais voulu. Je faisais des plans ambitieux afin d’accomplir tout le travail avant le déjeuner et inévitablement, quelque chose nous perturbait. Nous nous engagions un peu trop dans une leçon de biologie ou nous trouvions le livre que nous lisions si fascinant que nous lisions quatre chapitres au lieu d’un. Il y avait toujours quelque chose pour nous empêcher d’aller à l’étude biblique.

« Tu penses que nous pouvons accomplir tout le travail à l’heure ? » demandai-je.

Il hocha la tête avec optimisme et se mit au travail.

Juste avant 14 heures, Zac termina le dernier devoir. Alors, nous sommes montés tous les trois dans la voiture.

« Hé ! Quelle bonne surprise ! » Nous salua Paula à la porte.

« Les enfants sont derrière dans la cour », indiqua-t-elle à mes deux enfants.

Une heure plus tard, vers la fin de notre étude, nous avons entendu un hurlement.

Un des garçons est entré en courant, « Josh est blessé ! » Paula a couru dehors pour vérifier l’état de son plus jeune enfant.

Bientôt elle est rentrée, le tenant dans ses bras. Un côté de sa tête était couvert de sang.

« Que s’est passé ?! » Une femme courut chercher une serviette humide.

Theo, le frère aîné de Josh, raconta. « Tera l’a frappé avec un balai. »

Ses paroles m’ont fait perdre le souffle. « Elle a fait quoi ? »

« Elle a ramassé un balai cassé et « claque ! » Elle l’a frappé sur la tête. »

Je suis sortie. Mon mécontentement s’est changé en pure colère à ce que je voyais : Tera se balançait avec insouciance—en chantant. Elle n’avait pas l’air d’une fille en furie qui frappait avec un balai, mais il y avait des témoins.

« Mademoiselle, viens ici immédiatement. »

Au son de ma voix, elle eut sur son visage un regard étonné. Elle ralentit la balançoire, puis elle s’arrêta complètement. Elle avança à petits pas décidés vers le lieu où je me tenais.

« Qu’est-ce qui s’est passé ici ? » demandai-je.

Elle prit une grande inspiration, qui signifiait que l’explication allait prendre toute l’énergie qu’elle possédait.

« Eh bien, c’était comme ceci Maman. » Elle ôta une mèche de cheveu blond de ses yeux, puis elle fit un geste dramatique comme si elle était un témoin oculaire racontant pour un journaliste à la télévision. « Je tenais debout là-bas. Alex a décidé de monter dans la petite voiture. Et puis ce…ce… JOSH, dit- elle d’un ton exaspéré, a essayé de pousser Alex de la voiture. Il allait la blesser, maman, exprès. »

Le regard qu’elle m’a donné a été d’une pure justification—comme si elle avait le droit de frapper Josh sur la tête.

J’ai regardé à terre et j’ai vu le balai incriminé. En le ramassant, j’ai scruté les bords déchiquetés du bout cassé.

« Alors, tu as décidé de le blesser en premier ? »

Elle hocha la tête. Ma colère s’est accrue.

« Eh bien, c’était une très mauvaise décision. »

Sa gorge s’est serrée.

« Tu prends ton manteau, tu t’excuses auprès de Josh, et puis tu vas directement dans la voiture. »

Elle a pris son manteau, elle s’est excusée auprès de Josh, et elle est allée directement dans la voiture.

Je me sentais mal. Paula, s’apprêtant à partir pour emmener Josh au service de consultation pour se faire mettre des points de suture, était beaucoup plus compréhensive que je ne l’aurais été a sa place. « Je suis sûre que Tera ne réalisait pas ce qui se passerait », dit-elle. « Elle pensait qu’elle protégeait Alex. »

Je n’ai été pas réconfortée. Et je ne me suis sentie mieux non plus quand une autre femme essaya de me consoler. « Ce n’est pas la première visite au service de consultation pendant l’étude biblique. » a-t-elle ri. « Maintenant, les réceptionnistes nous cherchent les jeudis après midis. »

En montant dans la voiture, Tera a chuchoté, « je suis désolée Maman. »

J’ai à peine entendu.

« Désolée ? Tu n’as pas l’air d’être désolée. Mais tu devrais être désolée, mademoiselle. »

Nous avions prévu de retrouver Dave et une autre famille dans un restaurant proche.

Tout le long de la route, je sermonnai Tera.

« Depuis quand as- tu commencé à être méchante avec les autres enfants ? Qu’est-ce que tu pensais? Es- tu consciente de combien je suis embarrassée et énervée ? Qu’est–ce que tu penses que Paula ressent maintenant pendant que son fils est recousu à la tête ? A quoi pensais-tu en ramassant ce balai et en commençant à frapper ? »

Elle n’a pas répondu à une seule question. Je ne la laissais pas. Je ne me suis pas arrêtée jusqu’à ce que nous entrions dans le parking du resto et que j’ai éteint le moteur. Puis je l’ai regardée. Mais elle ne me regardait pas maintenant. Elle fixait son regard à travers la pare brise comme si elle observait la plus fascinante vision dehors dans le parking.

Son stoïcisme, observé à travers ma colère, avait l’air de pure insubordination.

Nous restâmes silencieuses pendant plusieurs minutes. Même Zac était silencieux, bien que quelque chose dans son regard me disait qu’il avait envie de défendre sa sœur. Quelque chose dans mon regard lui dit de ne pas le faire.

Dans le silence, je repensais avec horreur à la famille qui est partie de notre église. Est-ce que Tera avait fait quelque chose de vicieux à Brandon aussi ? Mon esprit allait à toute vitesse. Est-ce ainsi que les gens allaient commencer à parler de nous ? « Vous savez, cette église dans cette rue, celle avec cette fille de pasteur effrayante. Elle est petite mais dangereuse. »

Je regardai encore à Tera. Elle n’avait pas bronché.

J’ai commencé une prière silencieuse. « O Seigneur, aide-moi à penser à quelque chose qui pourra voir un impact—quelque chose qui l’atteindra. »

Cela prit une minute pour entendre sa réponse. Pendant ce temps-là, j’avais déjà commencé à formuler un nouveau sermon. J’ai décidé de décrire pour elle tout le processus nécessaire pour recoudre quelqu’un. Mais le Seigneur m’a arrêtée.

Je sais toujours quand c’est lui qui me parle en plain milieu d’une crise, car ce qu’Il dit est tellement à contre sens à ce que je pense. Cette occasion n’a été pas différente.

Il a chuchoté « grâce ».

Et puis, parce que j’étais tellement confuse, il chuchota encore. Grâce.

Je voulais combattre sa voix, mais je ne le pouvais pas. Pendant que je luttais, Il a continué à se révéler à moi.

Elle veut être pardonnée.

Elle est prête à venir à Moi.

C’est toi qui bloques son chemin.

Cette dernière chose a été le comble. J’ai eu une vision de ma fille qui tendait les bras vers Jésus qui avait les bras ouverts—et moi qui tenais entre les deux, en bloquant chacun de ses mouvements.

Mon cœur était serré. Cela m’a pris quelques minutes afin de trouver les bonnes paroles.

« Tera, Zac, Je vous dois des excuses, tous les deux. »

Ils tournèrent la tête vers moi.

J’ai regardé Tera dans les yeux. « Es-tu désolée pour ce que tu as fait ? » Elle hocha la tête.

« Alors, tu n’as besoin d’aller qu’à une seule personne, Jésus. Il est prêt—maintenant—pour te pardonner. » Nous nous sommes pris la main. Je l’ai laissé prier.

« O Jésus » dit-elle, « aide-moi à être une meilleure fille. »

Puis ma petite fille stoïque, têtue, a lâché les larmes qu’elle refoulait à peine –et elle a sangloté.

J’ai défait sa ceinture de sécurité et je l’ai mise sur mes genoux. Nous avons pleuré ensemble et après quelques minutes, j’ai senti toute la tension s’écouler de son corps.

Nous avons entendu la porte d’un van claquer.

« Voilà Chris et Cora » dit Zac.

Nos amis étaient arrivés. Leur petit garçon—un autre Josh—se tenait debout dehors et agitait la main vers Tera.

« Es- tu prête aller voir ton ami ? » demandai-je.

Elle m’a donné un grand sourire et elle est descendue de la voiture. La culpabilité m’a gardée à ma place.

« Tu ne viens pas ? » demanda Chris.

J’ai hoché la tête. « J’arrive dans une minute. Cela ne vous dérange pas si Zac et Tera entrent avec vous ? »

J’ai regardé mes enfants qui marchaient vers le restaurant avec nos amis et en faisant cela, mes paroles dures me revenaient. Comment ai-je pu être si sévère, inflexible ?

Il m’est venu à l’esprit tout d’un coup, que j’allais décrire la grâce à mes enfants chaque jour pendant les vingt prochaines années, et cela n’aurait aucun effet jusqu’à ce que je commence à la leur démontrer avec ma vie.

Mon cœur était lourd. Mais ensuite, pendant que je regardais, Tera a commencé à sautiller. Elle a dit quelque chose à Josh, et elle a rejeté sa tête en arrière, et elle a levé les mains en air.

Avec un fou de rire, ils faisaient la course en sautillant jusqu’à la porte du restaurant.

Ne veux-tu pas aussi être pardonnée ? demanda le Seigneur.

Est-ce que je voulais le même cœur léger, la même liberté que je venais d’observer chez ma fille ? Est-ce que je voulais sa joie, repartir à zéro ? Est-ce que je voulais avoir mon fardeau enlevé ?

« Oui, Père. »

J’ai réfléchi, et j’ai vu que rien ne bloquait le chemin. Ses bras étaient ouverts pour moi aussi, et il n’y avait pas une seule chose entre nous.

Je suis sortie de la voiture et j’ai traversé le parking. À l’intérieur, je sautillais.

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