On ne va jamais gagner tout le monde


Je ne sais toujours pas pourquoi Stéphane (1) a quitté l’Eglise. Je ne saurais compter les heures que j’ai passé avec lui. J’étais à ses côtés quand il a fait ses premiers pas en tant que jeune chrétien ; je l’ai baptisé ; nous avons souvent prié ensemble au sujet de sa lutte âpre contre le péché ; je me suis même déplacé à Orléans sur son lieu de travail pour pouvoir manger avec lui et développer une amitié et puis, du jour au lendemain, il est parti sans rien dire, sans explication.
J’avais un sentiment de trahison. Comment pouvait-il agir ainsi, après tout ce que j’avais fait pour lui... Pourquoi cet échec ? Avais-je fait fausse route quelque part ? Avais-je péché ? Evidemment, j’ai trouvé en moi des attitudes qui n’étaient pas justes. Pas facile de ne pas culpabiliser dans une telle situation.
De nos jours et à juste titre, nous mettons un accent croissant sur le relationnel dans nos Eglises. Des véritables rapports d’amitié. Dans une société froide et impersonnelle, nos communautés doivent devenir des lieux de convivialité et de relations vraies. Beaucoup de personnes comme Stéphane ont de la peine à tisser des liens à cause d’un lourd passé ou d’un parcours chaotique.
Mais cette pensée m’enfonce encore plus. Je n’ai pas su agir comme il fallait.
Quand je lis les Evangiles, je suis émerveillé devant la qualité relationnelle de mon Seigneur. Je suis frappé par sa capacité de mener, d’enseigner et d’animer une bande d’amis acquise à sa personne. Je suis touché par sa finesse et sa compassion devant Nicodème et la femme samaritaine. Quand je lis I Corinthiens 13, j’y vois évidemment l’expression de la vie de Jésus.
Mais même celui qui n’a jamais fait d’erreur sur le plan relationnel, n’a pas pu gagner tout le monde. Le cas de Judas Iscariot nous laisse perplexe. Il n’était pourtant pas traité différemment des autres disciples. Le Seigneur reconnaît son potentiel et le valorise en lui accordant la place de trésorier dans son équipe. Jésus va même lui laver les pieds juste avant sa trahison. Et pourtant Judas repousse l’amitié et la complicité du Fils de Dieu parfait.
Mais Judas n’est pas le seul.
Quand Jean raconte « A partir de ce moment–là, beaucoup de ses disciples l’abandonnèrent et cessèrent de l’accompagner. Alors Jésus, se tournant vers les Douze, leur demanda : –– Et vous, ne voulez–vous pas aussi partir ? » Jean 6.66-67, la déception est clairement apparente dans la voix de Jésus.
Le Maître a expérimenté les mêmes émotions et sentiments que moi
« En effet, nous n’avons pas un grand–prêtre qui serait incapable de se sentir touché par nos faiblesses. Au contraire, il a été tenté en tous points comme nous le sommes, mais sans commettre de péché. Approchons–nous donc du trône du Dieu de grâce avec une pleine assurance. Là, Dieu nous accordera sa bonté et nous donnera sa grâce pour que nous soyons secourus au bon moment. » Héb 4.15-16
Chris Short est pasteur d'une église évangélique à Pontault-Combault en Seine et Marne (Il est ancien directeur d'OM)
(1) Nous avons changé délibérément le nom et quelques détails par souci de secret professionnel
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